Communiqué de presse de Place publique du 2 septembre 2025
44 milliards d’économie : ni souhaitable, ni possible, ni demandé
Le gouvernement s’entête à proposer 44 milliards d’économies pour le budget 2026, un chiffre dont personne ne comprend l’origine.
Aurore Lalucq, co-présidente de Place Publique et Présidente de la Commission des affaires économiques et monétaire (ECON) du Parlement européen l’a rappelé dès juillet dernier : les institutions européennes observent la nécessité d’une économie de 120 milliards sur 5 ans. Un effort, déjà conséquent, de 20 à 25 milliards est donc demandé. Pas plus.
Quel que soit le gouvernement, il faudra de toute façon présenter un budget à même d’obtenir une majorité à l’Assemblée nationale. C’est pourquoi Place publique appelle depuis le mois de juillet au dialogue et au compromis à travers des propositions qui reposent sur quelques principes : une trajectoire crédible car réaliste qui donne de la visibilité aux Français et aux acteurs économiques ; un effort réparti de manière juste qui n’impacte pas la croissance économique et réinjecte l’argent qui dort dans l’économie.
S’accorder sur le constat et ces lignes directrices s’avère essentiel et précède toute discussion technique. L’heure n’est pas aux grandes réformes de structure mais à l’élaboration d’un chemin de compromis acceptable qui permette de gouverner et d’assurer une forme de stabilité. Voici ce que nous proposons.
1. Répondre au diagnostic posé et adopter une trajectoire sérieuse et crédible
Le budget présenté s’empare d’un mauvais diagnostic et débouche sur de mauvaises réponses. Le déficit de la France s’explique par un manque de croissance et des choix fiscaux non financés comme l’ont rappelé les institutions européennes à plusieurs reprises. Rappelons que sans les réformes fiscales de l’ère Macron, le déficit de la France ne dépasserait pas aujourd’hui les 3%.
Pourtant le gouvernement français s’entête à imposer une potion aussi drastique qu’inefficace, bien au-delà de ce qui lui est demandé par les institutions européennes. Présenté comme un gage de sérieux par le gouvernement, une coupe budgétaire de 44 milliards est en réalité un objectif impossible à atteindre, qui décrédibiliserait encore un peu plus la parole de la France. En outre, une telle coupe budgétaire, si elle était réalisée, provoquerait un effet récessif et aggraverait encore l’état de nos finances publiques. Moins de consommation, c’est moins d’activité, et donc moins de recettes fiscales : un cercle vicieux.
- Il est donc urgent d’adopter une trajectoire crédible et sérieuse : 120 milliards d’euros d’économie sur 5 ans, soit 24 milliards d’euros par an.
- Les efforts proposés doivent être justes, équitablement partagés et ne pas peser sur la croissance
2. Proposer un contrat de stabilité
Ce n’est pas la dette qui bloque la croissance aujourd’hui, mais des discours alarmistes qui, à force de créer instabilité et incertitude, paralysent la consommation et l’investissement et risquent même d’engendrer de l’instabilité financière. Ce que veulent les Français c’est de la prévisibilité et ce que demandent les entreprises c’est de la stabilité dans les règles. On ne peut pas gouverner par à-coups.
- Nous proposons un contrat de stabilité qui vise à s’accorder sur une trajectoire de réduction de la dette et des déficits sur 5 ans, afin de donner un horizon aux Français et permettre d’ouvrir le débat politique à d’autres sujets majeurs tels que la réindustrialisation du pays.
“ Notre pays a besoin d’une trajectoire sérieuse et crédible, un horizon certain, loin des discours catastrophistes qui vont finir par freiner la reprise économique et créer les conditions d’une instabilité financière” – Aurore Lalucq
3. Répartir l’effort de manière juste
Tout le monde en convient, nous devons faire un effort. Mais cet effort doit être réparti de manière juste. Il ne peut reposer sur les services publics, la santé, les classes moyennes et populaires, qui ont déjà perdu en pouvoir d’achat. Il est temps de mettre à contribution ceux qui peuvent se le permettre, à savoir celles et ceux qui ont bénéficié de la politique fiscale de ces dernières années.
Qui sont-ils? Les personnes les plus aisées et les grandes entreprises tandis que les actifs ont perdu en pouvoir d’achat. Ce sont donc ces catégories qui doivent en premier lieu faire un effort. En outre, trop d’argent dort et ne sert pas l’économie.
Une fiscalité plus juste : Quelle que soit la formule choisie, il est nécessaire de construire une fiscalité qui remette l’argent qui dort dans le circuit économique en taxant le patrimoine et son capital financier non productif. Mais il nous faut aussi dégager une majorité à l’Assemblée nationale pour que cette fiscalité soit acceptée.
- Nous demandons de taxer le patrimoine des plus fortunés, ce peut être sous dispositif anti-abus “Zucman” ou tout autre dispositif de taxation de la richesse, celle-ci s’accumulant à travers les années (plus-value latentes) et accroissant les inégalités. Un impôt sur la fortune à seuil élevé sans exemption mais accompagné d’un dispositif d’étalement des paiements pour les biens professionnels (activité opérationnelle principale réelle) permettrait de dégager de nouvelles recettes sans subir les biais dont il souffrait avant 2017.
- Alors que les bénéfices d’un certain nombre d’entreprises se sont envolés ces dernières années, il faudra également mettre en œuvre un mécanisme automatique de taxation des superprofits des multinationales
- En guise de compromis et afin d’éviter toute augmentation de la TVA, nous pouvons soutenir une hausse de la CSG dès lors que les bas revenus en sont exemptés.
- Enfin, dans le domaine de la santé, une question centrale pour les français, l’assurance maladie, dont la gouvernance est assurée par les partenaires sociaux, avait proposé un plan de 4 Milliards d’euros d’économie. Ces mesures constituaient une base solide de travail sur laquelle le gouvernement devrait s’appuyer.
4. Encourager l’investissement privé en mettant l’argent qui dort au service de l’économie
La France vit paradoxalement en dessous de ses moyens. En d’autres termes, nous n’investissons ni ne consommons assez. Les marges budgétaires étant réduites, il est indispensable d’encourager l’argent du secteur privé à reprendre le chemin de l’investissement.
- Nous soutenons une fiscalité plus juste des revenus dits passifs ou financiers en augmentant la Flat Tax de 30 à 34 % [Prélèvement forfaitaire unique], ainsi que la fin de l’effacement des plus values latentes afin de rapprocher la fiscalité du capital de celle du travail. Dans ce cadre, un taux progressif, plus élevé pour les plus hauts revenus est également envisageable.
- Lutter contre les niches fiscales : nous soutenons la suppression d’un certain nombre de niches fiscales qui permettent actuellement aux plus aisés d’optimiser leurs impôts (pacte dutreil, transmissions d’entreprises etc.) pour un total de près de 3 milliards d’euros, mais aussi une fiscalité plus juste des résidences secondaires, locations saisonnières et des logements vacants ainsi que plus de moyens pour sa mise en œuvre.